Notice d'exposition par Jill Gasparina

Devant les photographies d’Anne-Lise Seusse, le spectateur pense d’abord au travail de Bruno Serralongue, pour l’extême précision de la prise de la vue à la chambre, et la nature très posée des sujets.
Mais son univers visuel et mental s’éloigne fortement de celui du photographe. L’artiste cite plutôt un non-photographe comme référence, et il s’agit de l’auteur James G. Ballard. Pour commencer, le Mont Verdun, près de Lyon, est à la fois le siège d’une base de contrôle de l’armée de l’air et un lieu de rencontre privilégiés des riders lyonnais (qui apparaissent d’ailleurs dans d’autres oeuvres de l’artiste).
Cet espace est donc un étrange mélange de divertissement et de fantasme technicologico-sécuritaire, un lieu typiquement ballardien, à la géomêtrie menaçante.
Dans la série du Mont Verdun, beaucoup d’éléments évoquent encore l’écrivain britannique, la bizarrerie des formes visibles sur les tirages (la forme verte monumentale-plateforme pour ball trap-dont la destination est d’abord peu identifiable), ou l’alliance de la dureté technologique et de la nature au sein d’un paysage qu’on soupçonne de
n’être qu’une pure construction humaine.
Enfin ce sont les ébauches de récits flottant dans ces images qui rendent cette étonnante référence tout à fait pertinente. Au sein de la série, Alain, personnage central, apparaît d’abord seul. Mais la singularité de son accoutrement pousse d’emblée le spectateur à projetter des visions atomiques sur ce simple portrait, visions que l’anomalie des couleurs - des touches de rouge sanguin( l’orange fluorescent des pigeons d’argile) dans le calme paysage - ne fait que renforcer par la suite : Anne-Lise Seusse crée, puis renverse les propositions narratives avec une perversité amusée.

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